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samedi 13 juillet 2013

Goscinny et le cinéma



Pour la 2ème rubrique de cet été diablogueux, c'est un petit tour (voire deux) au cinéma qui nous sera proposé et cela grâce à notre scénariste unanimement chéri. Goscinny et le cinéma (de son vivant) fut une histoire que l'on peut résumer rapidement: 4 dessins animés, deux coups manqués et deux coups de maître. Nous allons nous pencher sur ces derniers, ce qui va nous permettre de nous éloigner un peu de la bédé et nous rappeler quelques personnalités fort attachantes du cinéma français. C'est par l'entremise de son grand ami Pierre Tchernia et après plusieurs collaborations radiophoniques et télévisuelles que Goscinny entra de plain-pied dans le monde du cinéma avec acteurs en chair et en os. 



Comme il ne pouvait en être autrement, c'est en tant que scénariste et dialoguiste qu'il collabora de façon active aux deux premiers films de celui qui reçut le surnom de Monsieur Cinéma non pas en raison du nombre de films qu'il réalisa (4 seulement) mais pour une émission consacrée au cinéma qu'il présenta à la télévision française. Le résultat de cette collaboration fut deux films délicieux : Le Viager (1972) et Les Gaspards (1974). Dans ces deux films, outre le tandem Goscinny-Tchernia (tous deux fruits de l'émigration polonaise), on retrouvera à chaque fois un duo comique irrésistible, Michel Galabru et Michel Serrault. Dès les premières minutes, le ton est donné et on flaire un "on-ne-sait-quoi" de goscinnien dans le générique des 2 films: des images d'archives reproduites à l'envers dans le premier et un beau travail d'animation où les panneaux de signalisation prennent vie dans le 2ème. Voici les 10 premières minutes de chaque film pour vous mettre l'eau à la bouche...
 





L'originalité des ces deux comédies ne se limitent pas au générique de départ mais s'étend à la structure entière des deux oeuvres avec chaque fois une idée initiale sortie du cerveau de notre scénariste favori, d'une part, dans Le Viager, le gag à répétition comme support de l'intrigue d'un film tout entier et puis, dans Les Gaspards, un film construit en deux niveaux superposés et parallèles, la surface et le sous-sol parisiens. Dans les deux cas, nous sommes bel et bien dans l'univers purement goscinnien et pas très loin de l'esprit bande dessinée. On retrouve également dans chacun des films des idées récurrentes dans l'oeuvre goscinnienne à savoir l'antihéros, merveilleusement interprété par Michel Serrault sous les traits du retraité Louis Martinet et du libraire Jean-Paul Rondin ainsi que celle du méchant ridicule et malchanceux représenté dans Le Viager par la famille Galipeau au complet (mention spéciale à Michel Galabru en docteur et chef de famille désopilant) et dans Les Gaspards par le commissaire Lalatte (encore Michel Galabru) et un ministre des Travaux publics mégalomane et napoléonien (un irrésistible Charles Denner). Le couple Goscinny-Tchernia nous font aussi cadeau de quelques scènes et dialogues très inspirés comme, par exemple, la consultation médicale au début du Viager (voir vidéo ci-dessus) avec quelques bons mots ("Je me suis usé tout seul") et une adorable explication enfantine du fonctionnement du viager. Même si l'autre film est sans doute d'un niveau inférieur, il offre aussi quelques bons moments de rigolade comme la rencontre dans le sous-sol parisien de Jean Valjean et du soldat inconnu.





Ou encore la scène de la déclaration de Rondin au commissariat avec un clin d'oeil de Goscinny à la profession d'auteur-écrivain à laquelle le commissaire préfère celle bien meilleure de libraire.




Pour ce qui est des coups manqués mentionnés au début de cette rubrique, il faut compter deux échecs cuisants qui ont sans doute empêché Goscinny d'entrer définitivement dans le club restreint des auteurs de cinéma. D'abord un projet d'adaptation au cinéma de la bande dessinée Iznogoud avec pour le rôle du méchant vizir qui veut être calife à la place du calife, le seul acteur capable d'incarner ce personnage: Louis de Funès. Le projet tombe à l'eau car ni Tchernia ni Goscinny ne parviennent à contacter la mégastar du moment. D'un naturel optimiste, Goscinny vise encore plus haut dans le projet suivant puisque, étant un grand fan de la série La Panthère rose, c'est à Monsieur Peters Sellers (himself) qu'il envoie un scénario intitulé Le maître du monde. Il n'y aura aucune réponse de la part de la vedette britannique mais, deux ans plus tard, on verra d'étranges similitudes entre le scénario envoyé par Goscinny et le nouvel épisode de la Panthère rose, The Pink panther strikes again sorti en France en 1977 sous le titre Quand la Panthère rose s'emmêle. De Funès et Sellers au service de Goscinny, cela aurait été plutôt bien mais n'ayons aucun regret car, de toutes façons, c'eût été peine perdue pour la carrière cinématographique du scénariste qui disparut quelques mois plus tard. Il ne nous reste plus qu'à voir ou revoir les deux films que Goscinny eut le temps d'écrire.







1 commentaire:

  1. J’ai eu la chance de regarder ces deux films grâce à un bon pote qui me les a filés ça fait quelque temps. Je me suis bien marrée avec les deux, quoique leur style humoristique soit tout à fait différent, zinzin sur les bords dans Les Gaspards , à mon avis. Par ailleurs, j’ai apprécié la leçon de morale dans Le Viager, un contrat dégueulasse, écœurant, tout ce que vous voudrez, dont j’ignorais l’existence, où un spéculateur essaie de profiter du plus grand malheur d’autrui. Là j’ai constaté la ressemblance avec les albums d’Asterix où l’on a toujours la sûreté de faire les pieds aux méchants. On ne craint jamais rien pour le héros. Bref (mon œil !), deux superbes films !

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