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lundi 23 septembre 2013

L'argent dette




Alors que Madame Angela Merkel vient de remporter les élections en Allemagne et par la même occasion un 3ème passeport pour la Chancellerie et que l’on se demande s’il faut en pleurer, en rire ou s’en tamponner le coquillard car, pour nous, pauvres petits Espagnols, Merkel ou Steinbrück, ce serait sans doute bonnet blanc et blanc bonnet, le diablogueur se dispose à enfiler son déguisement d'économiste en herbe (et en rogne) et à serrer un peu plus les vis au système monétaire et financier que nous avons reçu en cadeau. Ouf! Quelle phrase! Pour ce faire et pour éclairer notre lanterne, je vais recourir à un certain Paul Grignon, artiste-peintre de profession et auteur en 2010 d'un documentaire au titre révélateur: l'argent dette. Dans ce film ô combien instructif et didactique, Paul Grignon nous raconte les origines et l'évolution de l'argent tel qu'on le connaît aujourd'hui et comment l'usure, qui était considérée à une certaine époque comme un crime passible des pires châtiments, est devenue une pratique tolérée, normalisée et finalement obligatoire. On nous explique aussi quel mystérieux subterfuge a permis à des particuliers (les banquiers) de prêter non plus de l'argent comptant et sonnant mais un vulgaire morceau de papier (un reçu ou du papier-argent).  Autre tour de passe-passe, les banquiers, pour pouvoir gagner toujours plus et plus, ont commencé à prêter davantage d'argent que celui dont il disposait dans leur coffre. Plus il prêtait d'argent, plus il en gagnait. À notre époque où l'argent est virtuel et s'est transformé en chiffres enregistrés dans des banques (de données), le subterfuge n'en est que plus facile. Voici le documentaire en question découpé en plusieurs morceaux pour une digestion plus facile.






Finalement le documentaire conclut sur une démonstration assez compliquée d'une des multiples dérives de ce système monétaire, la nécessité absolue d'un développement et une croissance en augmentation permanente sinon tout le système bat de l'aile apparemment. On comprend mieux maintenant pourquoi les politiques n'ont que ce mot à la bouche (la croissance) et aussi pour quelles étranges raisons une faible croissance ou un statu quo de l'économie ne sont pas de mise. Effectivement il faut créer des emplois ... mais aussi de l'argent! Le développement durable si rabâché par les politiques semble bien être le dernier des soucis.








Le documentaire peut être discutable et discuté mais il a l'intérêt de poser des questions troublantes. Comment est-il possible que le monde entier (particuliers, entreprises, états) puisse être endetté en même temps et pour des sommes aussi colossales? Comment peut-il y avoir autant d'argent à emprunter? Pourquoi les taux d'intérêts sont-ils étrangement si bas depuis déjà belle lurette? Pourquoi recevons-nous des cartes de crédit à gogo? Pourquoi les gouvernements dépensent-ils de façon aussi démentielle? Pourquoi les gouvernements choisissent-ils d'emprunter de l'argent aux banques privées avec intérêts quand ils pourraient créer tout l'argent qu'il leur faut sans intérêt? Comment un système monétaire fondé sur l'accélération perpétuelle de la croissance peut-il servir à construire une économie durable? Que faut-il changer pour créer une économie durable? Pourquoi les états ont-ils donné un tel pouvoir à des banques privées? Nous essaierons de répondre à cette dernière question dans la prochaine rubrique... En attendant pour ceux qui n'apprécient pas les découpures, voici l'émission en entier.



L'Argent Dette de Paul Grignon (FR intégral) por bankster2008



 

"Quiconque croit que la croissance exponentielle peut continuer sans fin, dans un monde fini, est soit un fou, soit un économiste." 
(Kenneth Boulding, économiste)

dimanche 15 septembre 2013

Lehman Brothers



Le diablogueur va manquer aujourd'hui à une des ses maximes les plus chères (ne jamais traiter de sujets trop terre à terre) en inaugurant une rubrique ... économique. Vous me direz peut-être qu'après Méliès, nous passons du coq à l'âne. Vous ne croyez pas si bien dire! Après réflexion, je dirais plutôt que nous allons passer du lapin au vautour puisque la "vedette" du jour sera une banque répondant au nom tristement célèbre de Lehman Brothers. Pourquoi en parler aujourd'hui? Et bien parce qu'il y a exactement 5 ans, le 15 septembre 2008, était annoncée  dans tous les médias la faillite de cet hydre des finances. Triste anniversaire! Ce qui advint par la suite est connu de nous tous, une des plus terribles crises de l'histoire dont nous souffrons encore les conséquences. Comment cela a-t-il pu arriver? Quels en sont les responsables ou les causes? Difficile d'expliquer tout ça en quelques lignes mais cet ignorant en économie va s'y appliquer joyeusement. Laissons les responsables pour une prochaine occasion, venons-en aux causes. À mon humble avis, il y en aurait trois principales. D'abord, le propre fonctionnement du système économique et financier actuel dans lequel les états ont donné la faculté aux banques de créer de l'argent fictif. En effet, quand une banque concède un prêt à un particulier ou une entreprise, elle peut créer de l'argent sur la seule garantie du remboursement de cette dette. Pourquoi cet argent est fictif, tout simplement parce que les banques prêtent beaucoup plus d'argent que celui dont elle dispose dans leurs réserves. Ce "petit" tour de passe-passe est consenti par les dirigeants politiques et jusqu'à une date pas très lointaine, le ratio permis entre argent prêté et argent en dépôt était de 9 à 1 (par exemple, 1000 euros en dépôt et réels , 9000 euros prêtés). Or, dans les années 2000, ce ratio est passé mystérieusement  de 30 à 1, voire plus. Voilà nous sommes arrivés à la 2ème cause, depuis les années 80 et "grâce" aux gouvernements américains successifs (de Reagan à Obama), on a assisté à un dérégulation progressive des finances qui ont permis aux banques d'opérer sans aucun contrôle. C'est l'aberration incroyable de ce système car outre les particuliers et les entreprises, les états eux aussi empruntent de l'argent aux banques (avec intérêt bien sûr). C'est comme si vous donniez une massue à quelqu'un pour qu'il vous tape sur la tête. Absurde! La 3ème cause est une conséquence logique des 2 premières, l'apparition de gigantesques compagnies financières multinationales. Lorsqu'il s'agit de domaines comme l'alimentation (Nestlé), l'automobile (Toyota) ou l'acier (Arcelor Mittal), les conséquences sont souvent négatives mais quand nous parlons de banques ou de holdings financiers, cela se révèle tout bonnement catastrophique. En 2008, cinq de ces mastodontes dominaient sur l'échiquier de l'argent: Goldman Sachs, Bear Stearns, Morgan Stanley, Merrill Lynch et Lehman Brothers. Le 15 septembre, ces deux dernières se déclarent en faillite, Merrill Lynch sera renflouée par la Bank of America, Lehman Brothers tombera dans le gouffre. La suite, on la connaît avec la banqueroute du géant américain, c'est tout l'économie financière mondiale qui va s'écrouler comme un fragile château de cartes. Nous savons aussi (et comment!) qui va payer les pots cassés dans cette histoire, les états, les banques centrales et au final les gentils contribuables. 2500 milliards de dollars, ce sera le montant de la note plutôt salée. Pour plus de détails, je vous propose de regarder le documentaire Chronique d'un nouveau désodre mondial, diffusé sur la chaîne Arte le 22 octobre 2008. Instructif!!

samedi 7 septembre 2013

Georges Méliès



Comme il fallait s'y attendre, le diablogueur n'a pas pu résister à la tentation, n'hésitant pas à nous remettre une seconde dose de Méliès (prononcé le -s). C'est que le personnage est attachant et intéressant au possible comme le prouve la quantité de titres élogieux qui lui ont été attribués: l'homme-orchestre, l'alchimiste de la lumière, le (premier) magicien du cinéma. À la fin de sa vie et après sa disparition en 1938, ce sont les distinctions et les hommages qui ont plu sur cet ancien prestidigitateur reconverti au cinéma après avoir admiré la 1ère représentation du Cinématographe des frères Lumière en 1895. Tel fut le choc que Méliès essaya coûte que coûte et en vain de racheter le brevet de la merveilleuse machine à ses créateurs. Cependant cet échec ne l'empêcha pas de se lancer dans l'aventure cinématographique et bien lui en prit. En fait, Méliès a cru de toute son âme en cette nouvelle invention bien plus que ses créateurs eux-mêmes. Je vous propose voir la suite en images avec un extrait du plus bel hommage qu'on puisse rendre à Méliès c'est à dire un film. En l'occurrence, celui d'un spécialiste en la matière, Martin Scorcese et son Hugo Cabret (2011) où sont honorés le cinéma (muet) des premiers temps et en particulier Georges Méliès.


Si, comme il est unanimement reconnu, la France a régné dans le domaine cinématographique jusqu'à la Première Guerre mondiale (relayée ensuite par l'Allemagne et les États-Unis), c'est en grande partie grâce à Monsieur Méliès. Malheureusement pour celui-ci aussi la Grande Guerre va signifier la ruine, la fin de sa carrière et l'oubli. On le retrouve bien des années plus tard simple vendeur de bonbons et jouets à la Gare Montparnasse. Triste sort pour un génie. Quant à son oeuvre, la majorité de ses films furent détruits ou fondus pour en extraire l'argent ou pour les transformer en peignes ou en baleines pour corset, Méliès lui-même détruisant ses copies personnelles dans un accès de colère. Paradoxalement ce sont les copies piratées de ses films (et oui déjà à l'époque...) ou d'autres confisquées qui ont en partie provoqué sa ruine qui vont aussi permettre le sauvetage de beaucoup de ses films. Il fallut attendre l'année 1929 pour que ses films soient de nouveau projetés et récoltent un triomphe lors d'un gala en son honneur à la salle Pleyel puis en 1931, il reçoit une Légion d'honneur plus que méritée lors d'un banquet qui convie plus de 800 personnes. Cet épisode-là est aussi repris dans le film de Scorcese.


À la fin de sa vie, il coula des jours paisibles et heureux en compagnie de sa femme et de sa belle-fille au Château d’Orly, la maison de retraite de la Mutuelle du cinéma qu'il va étrenner Quoi de plus juste! Sa petite-fille dira de lui plus tard: "Il était si gentil, toujours de bonne humeur, toujours plein d'idées pour se distraire et distraire le monde. Ce n'est pas étonnant qu'on découvre aujourd'hui la fraîcheur et l'enchantement de son oeuvre, car il est resté très près de ses rêves et de la poésie de l'enfance. Méliès était la joie de vivre, la malice au coin des yeux, une pirouette qui efface ce qui peut faire mal." Tout cela est bien palpable quand on regarde les quelque 600 films (de délicieux courts-métrages pour la plupart) qu'il nous a légués et qui depuis 2009 "appartiennent" à l'humanité tout entière (domaine public).
Merci Méliès!

dimanche 1 septembre 2013

Le Voyage dans la lune



Après une pause estivale un peu plus longue que de coutume, nous voilà de retour pour une nouvelle saison diablogueuse à souhait avec une 1ère rubrique consacrée au cinéma. En effet, il y a tout juste 111 ans sortait dans les salles obscures Le Voyage dans la lune de Georges Méliès. Cet événement cinématographique eut lieu le 1er septembre 1902 au théâtre Robert-Houdin à Paris et on peut imaginer les figures ébahies des spectateurs chanceux qui ont assisté à cette projection historique. Outre que Le voyage dans la lune est assurément un des premiers chefs d'oeuvre de l'histoire du cinéma, c'est aussi le premier film d'un genre qui est particulièrement à la mode aujourd'hui, la science-fiction. Un simple coup d'oeil sur l'affiche des (quelques) cinémas de votre ville vous en persuadera, ces derniers mois nous avons écopé entre autres de Pacific Rim, Oblivion, Elysium, After earth, Star Trek into darkness, ... tous aussi pétaradants et ressemblants les uns que les autres. Il est vrai que le cinéma actuel ne se distingue pas par son originalité, cela est encore plus vrai en ce qui concerne la science-fiction. Mais Méliès, c'était autre chose comme dirait l'autre. Point de violence gratuite, point de gadgets odieux, point d'artifices inutiles, à la place de l'innocence, de la poésie et de l'imagination. D'ailleurs ce genre nouveau s'appelait à l'époque féerie. Quel doux mot que celui-là, n'est-ce pas! Son auteur mériterait une douzaine de rubriques à lui tout seul. 


Sachez pour l'instant que Georges Méliès est né à Paris en 1861, qu'il a tourné plus de 600 films aux titres aussi évocateurs que Le Manoir du diable, Le déshabillage impossible, L'Homme à la tête en caoutchouc ou Le Voyage à travers l'impossible. Pour les besoins de ses films, il a inventé certains des premiers trucages de l'histoire du cinéma comme la surimpression ou le fondu-enchaîné et il fut un des premiers cinéastes à utiliser ces techniques de façon systématique. Pour ceux qui n'auraient pas vu le film, le diablogueur vous présente le joyau dans ses deux versions originales (en noir et blanc et en couleurs). On croyait perdu la version du film coloriée à la main par Méliès lui-même, heureusement une copie fort détériorée fut retrouvée à Barcelone en 1993, restaurée minutieusement et présentée au Festival de Cannes en 2011. Cette nouvelle version est fort discutablement agrémentée par une bande-son musicale composée par le groupe français Air. Libre à vous de couper le son de votre ordinateur (tablette, smartphone, ...) lors du visionnage.